Le mariage au delà des frontières
Comment est reconnu le mariage de français établis à l'étranger et celui d'étrangers vivant en France ou celui de personnes de nationalités différentes ? Quel va être leur régime matrimonial ? Telles sont les questions auxquelles le Droit International Privé tente de répondre.
Le mariage international produit, parfois sans qu'on en ait conscience, des effets juridiques. Mais, qu'est-ce qu'un mariage international ?
Ce mariage regroupe trois situations :
- Deux époux français vivant à l'étranger
- Deux époux étrangers vivant en France
- Deux époux de nationalités différentes
Ces situations sont de plus en plus fréquentes, voire banales. Malheureusement, les frontières juridiques sont encore bien réelles.
Comment le mariage doit-il être reconnu ?
Le mariage, pour être reconnu dans le pays de sa résidence ou de sa nationalité, doit obéir aux règles locales du lieu de sa célébration. Ainsi, des étrangers souhaitant se marier en France devront impérativement passer devant l'officier d'état civil français. Encore, le mariage de deux français à Las Vegas sera reconnu en France si les règles locales de l'Etat du Nevada ont bien été respectées.
Mariage de Français à l'étranger
Diverses formalités sont à accomplir lorsqu'un Français souhaite se marier à l'étranger, même avec une Française.
Avant leur mariage, les futurs époux doivent faire établir un "certificat de capacité au mariage" par le Consulat ou l'Ambassade de France du pays où le mariage sera célébré. Puis, ils doivent procéder à la publication des bans.
Le mariage de deux Français ou d’un Français et d’un étranger peut être célébré à l’ambassade ou au consulat. Toutefois, il est nécessaire de
se renseigner auprès de ces autorités, pour savoir si elles sont bien habilitées à célébrer le mariage dans le pays concerné. En pratique,lorsque les époux ne sont pas tous les deux Français, le mariage est célébré pour l'autorité locale compétente..
Ensuite, le mariage devra impérativement être transcrit sur les registres d'état civil français. Pour cela, les époux se rapprocheront utilement du Consulat de France ou de l'Ambassade de France pour demander cette transcription.
Mariage d'étrangers en France
Le mariage doit ici respecter les règles françaises, ce qui implique que ce mariage soit célébré devant l'officier d'état civil français (ou devant l'autorité consulaire ou diplomatique du pays dont les deux époux ont la nationalité).
Cependant, si la loi nationale de l'un des époux impose, comme condition de validité du mariage, la forme religieuse, il y aura lieu d'y procéder, nécessairement postérieurement au mariage civil, ceci afin que le mariage puisse produire ses effets dans le pays de la nationalité de cet époux.
Le dossier de mariage et l'audition préalable des époux sont des formalités indispensables à la publication des bans, elle-même préalable nécessaire à la célébration du mariage.
Les pièces à fournir pour constituer ce dossier de mariage sont précisées à l'article 63 du Code Civil, soit :
- La copie intégrale de l'acte de naissance de chacun des futurs époux, de moins de trois mois si elle a été délivrée en France et de moins de six mois si elle a été délivrée dans un consulat, (à défaut un acte de notoriété délivré par un notaire ou, à l'étranger, par les autorités diplomatiques ou consulaires françaises compétentes.
-la justification de l'identité au moyen d'une pièce délivrée par une autorité publique ;
-l'indication des prénoms, nom, date et lieu de naissance, profession et domicile des témoins, sauf lorsque le mariage doit être célébré par une autorité étrangère.
Les effets du mariage sur la nationalité
Le mariage n'a, en France, aucun effet automatique sur la nationalité. Cependant, un étranger épousant un français peut, après 4 ans de mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition que la communauté de vie affective et matérielle ait été continue entre les époux depuis le mariage et que le conjoint étranger justifie d'une connaissance suffisante de la langue française.
La déclaration doit être effectuée devant le juge d'instance, en France, ou auprès du Consulat compétent, à l'étranger.
Mariages internationaux : du nouveau depuis le 29 janvier 2019
Le règlement UE 2016/1103 du 24 juin 2016 mettant en œuvre une coopération renforcée entre les Etats, notamment en matière de reconnaissance et d’exécution des décisions relatives aux régimes matrimoniaux est entré en vigueur en France le 29 janvier 2019.
Ce texte s’ajoute aux règles de droit international privé (DIP) déjà existantes.
Quelles sont donc les règles de DIP applicables en matière d’union matrimoniale ?
Pour les époux mariés avant le 1er septembre 1992
On applique les règles de conflit de lois de droit commun (article 309 du code civil) et la jurisprudence Gouthertz : la loi applicable au régime matrimonial des époux est la loi choisie (loi d’autonomie) par les époux. En l’absence de désignation de la loi applicable à leur régime légal, la Cour de Cassation impose aux juges du fond de retenir la volonté présumée. La référence au premier domicile matrimonial des époux n'est qu'une présomption de la volonté des époux.
Pour les époux mariés entre le 1er septembre 1992 et le 29 janvier 2019
On applique la convention de La Haye du 14 mars 1978. Depuis 1992, les couples binationaux, ceux franco-français qui s’installent à l’étranger ou qui ont des biens à l’étranger sans faire de contrat de mariage, sont en principe soumis aux dispositions légales du pays dans lequel ils fixent leur 1ère résidence commune. A défaut, le 2ème critère retenu est celui de la loi nationale commune des époux.
Exemple : si un franco-algérien se marie avec une franco-belge, c’est la loi française qui s’appliquera à leur union en l’absence de résidence commune.
La mutabilité automatique
Par ailleurs, la convention prévoit qu’en cas de déménagement des époux dans un autre pays, et en l’absence de loi applicable choisie au moment du mariage, ils sont soumis automatiquement au régime matrimonial légal de leur nouveau pays d’accueil. Ce changement automatique (mutabilité) de loi applicable peut être immédiat si les époux viennent résider dans l'État de leur nationalité commune, ou différé au bout de 10 ans de résidence dans le nouvel État.
Dans les deux cas, ce principe de mutabilité de la loi entraîne une insécurité juridique pour les époux. C’est pourquoi le règlement européen du 24 juin 2016 a mis fin au changement automatique de régime matrimonial.
Pour les époux mariés après le 29 janvier 2019
Le règlement UE 2016/1103 instaure la possibilité de choisir, la loi d’un des États dont au moins un des conjoints possède la nationalité ou la loi de leur résidence habituelle au moment du choix (art. 22).
Si les époux n’effectuent pas de choix, la loi applicable est par principe celle de la première résidence habituelle des époux ; à défaut, « la loi interne de l’État avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, les époux présentent les liens les plus étroits ».
L’article 20 prévoit que la loi désignée par le règlement s’applique, même si cette loi n’est pas celle d’un État membre.
Que la loi soit choisie ou non par les époux, celle-ci s’appliquera à l’ensemble des biens, quel que soit le lieu où ils se trouvent (art. 21).