Les garanties réelles : nantissement et inscriptions hypothécaires
Les garanties réelles sont des actes juridiques qui permettent à un prêteur de garantir sa créance en se constituant préalablement un droit sur un bien identifié appartenant au débiteur. Ainsi, si ce dernier ne respecte pas ses engagements, le créancier pourra procéder à la saisie et à la vente du bien concerné pour se rembourser.
Il existe plusieurs catégories de garanties réelles :
Le nantissement
Qu’est-ce qu’un nantissement ?
C’est une garantie prise par les créanciers sur les équipements de travail (biens meubles ) de l’entrepreneur sans pour autant déposséder ce dernier.
En effet, il s’agit d’un gage sur un bien meuble sans dépossession de celui-ci. Le plus souvent, il s’agit d’un nantissement sur le fonds de commerce, l’entrepreneur apporte son fonds de commerce en garantie.
Le nantissement peut également s’appliquer sur des éléments incorporels tel que la clientèle, le nom commercial, l’enseigne, …
Cette garantie est fréquemment utilisée dans le cadre de la création, la reprise ou le développement d’un fonds de commerce. Toutefois, un nantissement ne peut jamais porter sur les marchandises.
Comment prendre un nantissement ?
Il doit être constitué dans un contrat passé entre l’entrepreneur et le créancier. Cela nécessite, d’une part, un écrit qui peut prendre la forme d’un acte authentique (titre exécutoire) ou d’un acte sous seing privé, et d’autre part, d'une inscription dans les 15 jours au Tribunal de Commerce. Le recours à un acte authentique permet d’avoir un titre exécutoir et ainsi de faire exécuter son droit (le remboursement de la créance par la vente du bien) sur simple présentation de l'acte à l'huissier, sans avoir à engager une procédure judiciaire longue et coûteuse.
Etant ici précisé que ce nantissement doit également faire l’objet d’une inscription auprès de l’INPI (Institut National de la Propriété Industrielle) si le nantissement porte aussi sur des éléments relevant de la propriété intellectuelle, telle qu'une marque, un brevet, ou un dessin & modèle.
Quels sont les effets du nantissement ?
Par cette garantie le créancier peut, en cas de non-paiement par l’entrepreneur faire vendre le fonds et avoir une priorité sur le prix de vente.
Pour ce faire, les créanciers disposent de deux droits :
- droit de préférence : le créancier qui bénéficie de ce nantissement ayant fait l’objet d’une inscription avant la cessation des paiements peut obtenir le règlement de sa créance par priorité par rapport aux autres créanciers de l’entrepreneur dans le cadre d’un redressement /liquidation judiciaire. La date d’inscription du nantissement est très importante car cela détermine le rang de préférence applicable entre les créanciers.
- droit de suite : le créancier peut faire vendre le fonds de commerce même si celui-ci n’est plus entre les mains de l’entrepreneur qui avait donné en garantie les éléments composant son fonds.
Ils existent d’autres garanties qui peuvent être inscrites au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS) tel que sur le nantissement portant sur l’outillage.
L’inscription hypothécaire
Lorsque l’entrepreneur créé, reprend ou développe son entreprise ou une société, il peut être amené à acquérir les locaux nécessaires pour l’exploitation de son activité professionnelle.
Les créanciers peuvent alors demander à titre de garantie l’inscription d’un privilège de prêteur de deniers, d’un privilège de vendeur ou d’une hypothèque conventionnelle.
Le privilège de prêteur de deniers
Il ne peut garantir que la partie du prix correspondant à la valeur du bien immobilier à l’exclusion des frais annexes (frais de notaire, travaux, commissions intermédiaires….). Le surplus des sommes empruntées fera l’objet d’une inscription d’hypothèque conventionnelle.
Ce privilège est constaté dans un acte notarié qui doit être inscrit au service de la publicité foncière dans les deux mois qui suivent la vente.
Dans l’acte qu’il rédige, le notaire constate :
- l’objet du prêt qui doit être le paiement total ou partiel du prix d’achat du bien immobilier ;
- l’origine des fonds prêtés et leur utilisation ;
- l’acceptation par le débiteur de l’octroi d’une sûreté sur son bien au profit du créancier.
Il prend rang à la date de la vente c’est-à-dire que le privilège sera prioritaire sur toutes les garanties qui peuvent être prises après cette date sur le bien. Le privilège donne au créancier le droit de faire vendre le bien en cas de non paiement. Le coût du privilège de prêteur de deniers est plus faible que celui de l’hypothèque conventionnelle car il est dispensé de taxe de publicité foncière mais les deux seront inscrits au fichier immobilier.
L’hypothèque conventionnelle
Elle peut être demandée par le prêteur. Les frais d’inscription sont généralement payés par l'emprunteur.
Elle constitue une sûreté réelle c'est-à-dire que le bien immobilier est affecté directement à la garantie de la dette, à défaut de remboursement du prêt dans les conditions prévues. L'hypothèque permet au créancier de faire vendre aux enchères (saisir) le bien sur lequel elle porte et d’être payé sur le prix de vente. Elle peut porter sur tout bien immobilier (terrain, entrepôt, appartement, maison…).
Elle est obligatoirement constatée par un acte notarié. Cette garantie n'est utile que si elle fait l’objet d’une inscription au service de la publicité foncière du lieu où se trouve le bien pour une somme et une durée déterminées.
Le notaire chargé de représenter le créancier procède sans délai à l’inscription de l’hypothèque. Plusieurs hypothèques peuvent être prises sur un même bien. La date de l’inscription détermine l'ordre entre les créanciers inscrits appelée « rang ». Ainsi, le créancier a tout intérêt à faire inscrire sa garantie le plus rapidement possible. En effet, lors de la vente forcée d’un immeuble grevé d’une garantie, les premiers inscrits sont les premiers payés.
Le créancier hypothécaire, quel que soit son rang, peut demander la mise en vente judiciaire du logement. L’hypothèque conventionnelle entraîne le paiement d’une taxe de publicité foncière (sur le montant du prêt et des accessoires garantis, par exemple les intérêts). Outre cette taxe, l’hypothèque supporte les émoluments du notaire, le salaire du conservateur des hypothèques, la Taxe sur la Valeur Ajoutée et les débours.
Depuis quelques années, l’hypothèque peut être utilisée plusieurs fois pour minimiser le coût, elle est dite rechargeable.
Le privilège du vendeur
Il permet à ce dernier qui n’a pas reçu lors de la vente, la totalité du prix, de se payer en cas de revente du bien avec les sommes qui lui restent dues par priorité par rapport aux autres créanciers, même hypothécaires.
Il faut que ce privilège soit inscrit au fichier immobilier dans les deux mois de la vente initiale comme le privilège de prêteurs de deniers.
Exemples de garanties réelles
Le nantissement de fonds de commerce
Le nantissement du fonds de commerce permet au créancier de vendre le fonds de commerce si le débiteur ne rembourse pas sa dette.
Il porte sur l’enseigne, le nom commercial, la clientèle, le droit au bail , les droits de propriété intellectuelle attachés au fonds de commerce, le mobilier commercial, le matériel ou l’outillage servant à l’exploitation du fonds (sauf si celui-ci a déjà fait l’objet d’un gage).
Ce nantissement doit faire l’objet d’un écrit (acte sous seing privé ou acte authentique ) et être publié au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel le fonds est exploité.
Le nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement
Un commerçant peut consentir un nantissement sur l’ensemble des éléments composant le fonds de commerce ou sur certains éléments seulement tels que le matériel et l'outillage servant à l'exploitation dudit fonds.
Dans ce cas, le nantissement porte donc uniquement sur l’outillage et le matériel et vise à garantir leur paiement ou le remboursement du prêt ayant servi à leur acquisition.
Le créancier nanti dispose dès lors de deux avantages :
- il peut saisir l’outillage et le matériel d’équipement pour procéder à leur vente en cas de non-paiement de la dette ;
- il est garanti d’être payé sur le prix de vente du matériel par priorité par rapport à d’autres créanciers.
Cet acte peut être rédigé sous seing privé ou par acte authentique et surtout doit lister et décrire de manière précise les biens nantis.
Le nantissement doit également être inscrit dans les 15 jours suivant l’acte constitutif au greffe du tribunal de commerce.
Le gage des stocks
Le gage des stocks est une convention par laquelle un établissement de crédit ou une société de financement, ayant consenti un crédit à une société ou à un entrepreneur, se voit accorder le droit de se faire payer sur les stocks par préférence aux autres créanciers.
Peuvent être donné en gage, à l’exclusion des biens soumis à une clause de réserve de propriété, les stocks de matières premières et approvisionnements, les produits intermédiaires, résiduels et finis ainsi que les marchandises appartenant au débiteur et estimés en nature et en valeur à la date du dernier inventaire.
Le gage des stocks peut être constitué avec ou sans dépossession. Dans le premier cas, le débiteur remet au créancier la chose gagée, les stocks. Dans le second cas, il la conserve et doit donc en assurer la conservation tant en quantité qu’en qualité.
L’écrit constatant le gage des stocks doit comporter certaines mentions obligatoires telles que la désignation des créances garanties, la description des biens gagés, la durée de l’engagement …. Il doit être inscrit au greffe du tribunal de commerce dans les 15 jours à peine de nullité.
A défaut de paiement de la dette garantie, le créancier peut poursuivre la réalisation de son gage, c’est-à-dire demander la vente des stocks.