Le mariage avec ou sans contrat ?
Dès que l'on est marié on est soumis a un régime matrimonial : il s'agit de l'ensemble des règles auxquelles sont soumises la propriété et la gestion des biens des époux. Le régime est fixé par un contrat de mariage ou à défaut par la loi.
Le mariage sans contrat : la communauté d’acquêts
C’est le régime qui s’applique aux époux mariés sans contrat de mariage depuis le 1er février 1966. A défaut d’aménagement particulier, les règles sont les suivantes.
Trois masses de biens doivent être distinguées :
- les biens communs
- les biens propres de chaque époux
Qu’est-ce qu’un bien commun (ou acquêt) ?
Les biens communs englobent tous les biens acquis à titre onéreux pendant le mariage, même financés par les gains de l'activité professionnelle de l'un ou l'autre des époux et les revenus de leurs biens propres (exemple : les loyers d’un appartement reçu par succession).
Qu’est-ce qu’un bien propre ?
Il s’agit des biens possédés avant le mariage et ceux qu'un époux reçoit à titre gratuit après le mariage (donations, successions), quelle que soit la nature des biens.
Il s’agit aussi des biens achetés durant le mariage avec de l’argent « propre » ou provenant de la vente d’un bien propre à condition d’en faire la déclaration dans l’acte. On parle de déclaration d’emploi ou de remploi de fonds propres.
Le mariage avec contrat : les choix possibles
Dans certains cas, il peut être très utile aux futurs époux de faire établir un contrat de mariage, soit pour aménager le régime légal, soit pour adopter un autre régime matrimonial (on parle de changement de régime). Cela sera notamment très opportun si les époux sont de nationalités différentes ou s’ils ont résidé, résident ou envisagent de résider dans un pays différent de celui de leur nationalité.
Le contrat de mariage permet de prévoir l'affectation du patrimoine ainsi que les règles de gestion et d'administration de celui-ci. En revanche, il ne peut contenir des clauses relatives au conséquences d'un éventuel divorce.
L'établissement de ce contrat nécessite d'avoir recours à un notaire avant le mariage. A défaut, les époux devront attendre deux ans après leur union pour pouvoir changer de statut matrimonial.
Les régimes matrimoniaux peuvent être classés en deux catégories : les régimes communs et les régimes séparatistes.
Quels sont les régimes de communauté ?
La communauté des biens meubles et acquêts
C'est le régime légal des personnes mariées sans contrat avant le 1er février 1966 et de celles qui le choisissent depuis cette date.
Tous les biens sont communs à l'exception des immeubles possédés par les futurs époux avant le mariage ou recueillis au cours de celui-ci, à titre gratuit (donations, successions).
La communauté d’acquêts
Si un couple se marie sans contrat il est automatiquement soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts. Les époux peuvent aussi l’adopter dans un contrat de mariage, par exemple, s’ils décident de s’installer à l’étranger et souhaitent être soumis à ce régime quel que soit le pays où il réside.
Ce régime distingue les biens que chaque époux possédait avant l’union ou reçu par donation ou succession pendant le mariage, des biens acquis en commun pendant le mariage avec les économies du ménage, les “acquêts”.
Chacun des époux peut accomplir seul les actes de gestion courante concernant les biens. Les décisions les plus importantes (vente ou donation…) doivent être prises à deux.
Dans deux cas, le juge peut autoriser un époux à réaliser un acte qu’il ne peut pas normalement accomplir seul : si son conjoint ne peut manifester sa volonté (incapacité, incarcération) ou si le refus de celui-ci n’est pas justifié par l’intérêt de la famille.
Peut-on moduler le régime de la communauté réduite aux acquêts ?
Oui, grâce aux avantages matrimoniaux prévus seulement en option par la loi et qui doivent faire l’objet d’un contrat. Ils permettent à un époux de tirer un avantage de son contrat de mariage par rapport à ce qu’il pourrait obtenir par la seule application de la loi.
Quelques exemples:
La clause de prélèvement moyennant indemnité : en cas de dissolution de la communauté, un conjoint a la possibilité de choisir un bien en priorité. La valeur de celui-ci est imputée sur la part de l’époux bénéficiaire. Si cette valeur excède sa part, il doit verser aux enfants la différence appelée soulte. Ainsi ces derniers ne sont pas lésés et le conjoint a la certitude que les enfants ne pourront pas exiger la vente du bien.
La clause de préciput : elle permet au conjoint survivant de prélever sur la communauté avant tout partage, soit un bien ou plusieurs biens, soit une somme d’argent. L’époux bénéficiaire ne doit rien à la communauté ni aux héritiers, ce qui constitue un avantage indéniable.
La clause de partage inégal : par cette clause, les époux décident que le partage se fera dans d’autres proportions que celles prévues par la loi, par exemple 3/4 ou 2/3 au profit d’un époux. Chacun des époux supportera le passif commun proportionnellement à la part qu'il recueille.
La clause d’attribution intégrale de la communauté : le survivant des époux recueille non seulement la moitié de la communauté qui doit lui revenir, mais également l’autre moitié soit en propriété, soit en usufruit .
La clause peut être stipulée au profit d’un seul ou des deux époux, mais elle ne joue qu’en cas de dissolution de la communauté par décès. Elle est très fréquemment associée au régime de la communauté universelle.
La clause d’apport en communauté : les époux apportent un ou plusieurs biens propres à la communauté qui acquièrent alors le statut de biens communs .
La communauté universelle
L'adoption de ce régime a pour conséquence la mise en commun de tout l'actif et tout le passif de chaque époux.
De quoi se compose l’actif ?
Il est constitué de tous les biens meubles (l’argent, les comptes titres…) et immeubles (maison, terrain…) que les époux possèdent au jour du mariage et ceux qu'ils acquerront au cours du mariage à titre onéreux (exemple : vente) et à titre gratuit (donation , succession).
Il existe une exception : ne font pas partie de cette communauté les biens propres par nature, c’est-à-dire ceux qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la personne (action en réparation de dommage corporel ou moral, et aussi vêtements, bijoux ...), sauf si les époux décident de les y intégrer.
Et les dettes ?
La communauté universelle supporte définitivement toutes les dettes des époux, présentes et futures, quelles que soient leur nature et leur origine.
Intérêt de la communauté universelle au décès d’un époux ?
En ajoutant une clause d'attribution au dernier vivant, au décès du premier époux, tout ou partie du patrimoine commun revient au conjoint survivant.
Cette clause d'attribution explique l'intérêt porté à l'adoption de ce régime notamment par les couples d'un certain âge, qui n'ont pas eu d'enfant (héritier réservataire) ou n'ont que des enfants communs.
Quels sont les régimes séparatistes ?
La séparation de biens
Ce régime établit une totale séparation entre les patrimoines de chaque époux. Son fonctionnement est simple.
En ce qui concerne l’actif du patrimoine : chacun des époux conserve l'administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens.
Tous les biens acquis pendant le mariage par l'un des époux, que ce soit à titre gratuit ou à titre onéreux, restent sa propriété.
Les biens achetés en indivision appartiennent aux deux époux en proportion de leur financement respectif, c'est-à-dire au prorata de leurs apports respectifs.
En ce qui concerne le passif du patrimoine : il n'y a en principe aucun passif commun. L'époux qui a contracté une dette en est le seul responsable.
Il existe deux exceptions:
- les dettes fiscales pour lesquelles la loi prévoit une solidarité entre époux, ce qui veut dire que chaque époux est redevable de la totalité des impôts vis-à-vis de l’administration fiscale.
- et les dettes contractées pour l'entretien du ménage et l'éducation des enfants : même si elles sont contractées par un seul époux, les deux en sont « responsables ».
Ce régime est particulièrement utile en cas de remariage dont sont issus des enfants ou dans le cas où l'un des époux exerce une activité professionnelle présentant des risques économiques, ceci afin de préserver le patrimoine du conjoint.
La participation aux acquêts
Ce régime est à la fois séparatiste et communautaire.
La séparation pendant le mariage : durant le mariage, les époux agissent comme s’ils étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. Ils conservent aussi bien la jouissance , que l’administration de leurs biens. Les créanciers de l’un ne peuvent saisir les biens de l’autre sauf en ce qui concerne les dettes relatives à l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants.
Le partage de l’enrichissement à la dissolution du régime : chacun des époux participe pour moitié à l’enrichissement de l’autre : c’est la créance de participation, qui en principe doit être payée en argent. Une clause de partage inégal peut également être prévue
La créance se détermine par comparaison entre le patrimoine final (tous les biens appartenant à chaque époux au jour de la dissolution du régime) et le patrimoine originaire (les biens appartenant à chacun des époux au jour du mariage et/ou ceux acquis par donation ou succession). Lors de l'établissement du contrat, le notaire peut proposer d’insérer une clause excluant certains biens, notamment les biens professionnels et ce afin d’éviter leur prise en compte dans la détermination de la créance de participation.
Si on constate un enrichissement, il est partagé par moitié. En revanche, si l’un des patrimoines s’est appauvri, l’époux concerné supporte seul cet appauvrissement.
La créance de participation doit être payée en argent ou par l’attribution d’un bien.
La société d’acquêts :
Elle permet d'adjoindre une partie de communauté à la séparation des biens, dont le contenu est librement défini par les époux.
Le changement de régime matrimonial
La situation familiale, professionnelle et patrimoniale des époux peut évoluer en cours d’union. Le choix d’un régime n’est pas définitif. Les époux peuvent en changer ou l’aménager d’un commun accord et dans l’intérêt de la famille.
Le changement porte soit sur la nature du contrat, comme le passage d’un régime de séparation de biens à un régime de communauté universelle, soit sur certaines clauses, comme l’instauration d’un avantage matrimonial.
Un acte notarié doit être établi.
En présence d'enfants mineurs sous tutelle ou d'enfants majeurs placés sous un régime de protection, l'information est délivrée à leur représentant.
L’homologation du changement de régime par le juge aux affaires familiales n’est nécessaire qu'en cas d'opposition d’un enfant majeur ou d’un créancier ou s'il est saisi par le notaire qui estime que le changement de régime matrimonial porte préjudice aux enfants mineurs.
A défaut d’opposition ou de présence de mineur, le changement de régime matrimonial produit ses effets entre les époux à la date de l’acte notarié ou du jugement d’homologation et vis à vis des tiers, trois mois après mention du changement en marge de l’acte de mariage.
Attention : le changement automatique de régime matrimonial
Il peut s’appliquer aux époux mariés après 1992 et avant le 1er janvier 2019 et résidant dans un pays différent de leur nationalité.